Les retards de livraison des avions chez Airbus et Boeing ont un impact significatif sur la dynamique des tarifs dans le secteur aĂ©rien. En dĂ©pit d’une demande soutenue et d’une hausse des coĂ»ts de production, les constructeurs aĂ©ronautiques peinent Ă rĂ©percuter ces hausses sur leurs prix. Selon des experts, la situation se complique davantage car les dĂ©lais de livraison sont devenus irrĂ©alistes, ce qui empĂȘche les avionneurs de profiter pleinement des conditions du marchĂ©. En revanche, les loueurs d’avions s’en sortent mieux, car ceux disposant d’avions disponibles peuvent augmenter leurs tarifs en raison d’une forte demande des compagnies, prĂȘtes Ă payer plus cher pour obtenir des appareils dans les meilleurs dĂ©lais.
EN BREF
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Au cĆur des enjeux Ă©conomiques de lâaviation commerciale, les retards de livraison rencontrĂ©s par les aĂ©ronefs produits par Airbus et Boeing exercent une pression significative sur la dynamique tarifaire du marchĂ©. Bien que ces grands avionneurs aient rĂ©cemment ajustĂ© leurs prix en rĂ©ponse Ă la hausse de lâinflation et au coĂ»t croissant de la production, ils se retrouvent dans une situation dĂ©licate oĂč les retards prolongĂ©s empĂȘchent une augmentation notable des tarifs. Cet article se penche sur les raisons de ces retards, l’impact sur les prix, ainsi que les opportunitĂ©s diffĂ©rentes pour les acteurs du secteur.
Un marché en tension
La rentrĂ©e 2024 s’annonce difficile pour les constructeurs aĂ©ronautiques. La conjoncture actuelle est marquĂ©e par une demande soutenue pour des avions, alors mĂȘme que lâoffre est contrainte par des retards de production et de livraison. L’industrie aĂ©rienne, souvent soumise aux rĂšgles de lâoffre et de la demande, aurait en temps normal dĂ» voir ses prix sâenvoler compte tenu de cette raretĂ© apparente des appareils. Pourtant, la rĂ©alitĂ© est bien diffĂ©rente : les ajustements tarifaires dâAirbus et Boeing sont restĂ©s modestes, en grande partie en raison des dĂ©lais inacceptables pour les clients.
Les causes des retards de livraison
Les retards de livraison subis par les avionneurs sont multifactoriels. Parmi les Ă©lĂ©ments les plus significatifs, on retrouve la crise des chaĂźnes d’approvisionnement, exacerbĂ©e par la pandĂ©mie de COVID-19, qui a perturbĂ© la production Ă lâĂ©chelle mondiale. De plus, la hausse des prix des matiĂšres premiĂšres et la pĂ©nurie de composants nĂ©cessaires Ă lâassemblage des avions ont Ă©galement contribuĂ© Ă ralentir la cadence de production.
Des entreprises comme Boeing annoncent des dĂ©lais supplĂ©mentaires, allant parfois jusqu’Ă un an pour certains modĂšles trĂšs prisĂ©s, tels que le MAX 737. Pendant ce temps, lâappĂ©tit des compagnies aĂ©riennes pour lâacquisition de nouveaux appareils demeure intact. La demande croissante sâexplique par le besoin de renouveler des flottes de plus en plus anciennes et de rĂ©pondre Ă une demande de passagers en constante augmentation.
Impact sur les prix des avions
Face Ă cette situation, Airbus et Boeing ont pourtant procĂ©dĂ© Ă des rĂ©visions Ă la hausse de leurs tarifs pour compenser lâinflation et lâaugmentation des coĂ»ts de production. Cependant, ces ajustements restent largement en deçà des potentielles augmentations qui auraient pu ĂȘtre observĂ©es en raison de la faible disponibilitĂ© des avions.
Les analystes du secteur prĂ©voient que, malgrĂ© lâinflation persistante et la hausse des coĂ»ts, les prix des avions ne pourront pas augmenter de maniĂšre significative tant que les retards de livraison perdureront. Selon Marc Durance du cabinet Indefi, « Hormis ces ajustements, il nây a pas dâeffet dâaubaine pour Airbus et Boeing liĂ© au dĂ©sĂ©quilibre de lâoffre par rapport Ă la demande ». Cela signifie quâen raison des retards, les gĂ©ants de lâaĂ©ronautique ne peuvent pas tirer profit d’une situation qui, en thĂ©orie, devrait accorder Ă leurs produits une valorisation tarifaire plus Ă©levĂ©e.
Les loueurs comme moteurs de hausse tarifaire
Ă lâopposĂ© des constructeurs, les opĂ©rateurs de location dâavions se trouvent dans une position beaucoup plus favorable. La raretĂ© des appareils disponibles permet aux loueurs de nĂ©gocier des hausses de prix significatives. Les compagnies aĂ©riennes se voient contraintes d’accepter ces augmentations, dĂ©sireuses de disposer rapidement d’avions pour rĂ©pondre Ă la demande croissante et Ă©viter ainsi que leur croissance commerciale ne soit compromise. Par consĂ©quent, les valeurs des contrats de location grimpent, entraĂźnant des augmentations Ă deux chiffres dans certains segments.
Cet Ă©tat de fait met en Ă©vidence un plastique dĂ©sĂ©quilibre entre les acteurs de la chaĂźne aĂ©rospatiale. Alors quâAirbus et Boeing sont freinĂ©s dans leur capacitĂ© Ă ajuster leurs prix en raison de l’inefficacitĂ© des livraisons, les loueurs profitent pleinement de cette dynamique pour renforcer leur pouvoir Ă©conomique face aux compagnies aĂ©riennes.
Perspectives d’avenir pour Airbus et Boeing
Les dĂ©fis que rencontrent les avionneurs ne montrent, pour lâheure, aucun signe dâamĂ©lioration. Le directeur de l’IATA a rĂ©cemment alertĂ© sur le fait que les retards de livraison ne devraient pas s’amĂ©liorer dans un avenir proche. Pour Airbus, lâattente est palpable, comme Ă©voquĂ© par son PDG, qui fait Ă©tat dâun « chemin semĂ© dâembĂ»ches » pour atteindre les objectifs de livraison fixĂ©s pour 2024.
Les consĂ©quences de ces dĂ©fis sont multiples. Ils affectent non seulement les revenus Ă court terme des constructeurs, mais Ă©galement leur rĂ©putation et leur position sur un marchĂ© de plus en plus compĂ©titif, oĂč chaque jour de retard se traduit par des pertes potentielles. Les compagnies aĂ©riennes qui souffrent de ces retards et qui sont contraintes de prolonger la vie de leurs avions ĂągĂ©s exposent Ă©galement des enjeux environnementaux, car ces appareils moins efficaces consomment plus de carburant et donc, sont moins respectueux des normes Ă©cologiques en constante Ă©volution.
L’innovation face aux dĂ©fis
Pour sâadapter Ă cette dynamique perturbante, Airbus et Boeing devront continuer dâinvestir dans l’amĂ©lioration de leurs chaĂźnes de production et dans l’innovation technologique. Cela comprend l’intĂ©gration de nouvelles mĂ©thodes de fabrication, la diversification des sources dâapprovisionnement, ainsi que des partenariats stratĂ©giques avec des fournisseurs clĂ©s. Par exemple, Airbus sâapprĂȘte Ă finaliser un accord financier stratĂ©gique avec Spirit Aerosystems, un fournisseur essentiel dans la fabrication de certains composants dâAirbus, afin d’optimiser ses capacitĂ©s de production et garantir des dĂ©lais de livraison plus fiables.
Les enjeux Ă©conomiques qui touchent lâindustrie aĂ©ronautique sont donc complexes et interconnectĂ©s. En poursuivant ces efforts d’optimisation et d’innovation, les constructeurs pourront espĂ©rer restaurer la confiance et sĂ©curiser leurs commandes futures tout en amĂ©liorant leurs performances financiĂšres.
TĂ©moignages sur les retards de livraison chez Airbus et Boeing
Les rĂ©cents retards de livraison des avions chez Airbus et Boeing ont suscitĂ© de nombreux tĂ©moignages de professionnels du secteur aĂ©ronautique. Un directeur d’une compagnie aĂ©rienne a partagĂ© : « Nous avions prĂ©vu d’Ă©largir notre flotte, mais avec ces dĂ©lais inacceptables, nos plans sont mis en suspens. Nous avions besoin de nouveaux appareils pour rĂ©pondre Ă une demande croissante, mais il semble que nous devrons continuer Ă exploiter des avions plus anciens. »
Un responsable de leasing a ajoutĂ© : « Les retards actuels permettent aux loueurs de profiter de la situation. Ceux qui disposent d’avions prĂȘts Ă ĂȘtre louĂ©s peuvent clairement augmenter leurs tarifs. Les compagnies sont prĂȘtes Ă payer plus cher pour obtenir un avion sans attendre des mois. Cela crĂ©e une vĂ©ritable distorsion dans le marchĂ©. »
Un analyste du secteur a Ă©galement soulignĂ© l’impact sur la tarification : « MalgrĂ© une demande accrue, les tarifs chez Airbus et Boeing n’ont pas suivi la tendance gĂ©nĂ©rale du marchĂ©. La situation est paradoxale : alors que la loi de l’offre et de la demande suggĂ©rerait une augmentation des prix, les retards de livraison les poussent Ă adopter une dĂ©cision d’attente. En consĂ©quence, nous voyons des ajustements limitĂ©s, juste pour couvrir les coĂ»ts. »
Enfin, un ancien ingĂ©nieur chez Boeing a tĂ©moignĂ© : « Les dĂ©lais de livraison deviennent dĂ©sastreux. Nous avons des clients qui font preuve de patience, mais jusqu’Ă quand ? La rĂ©putation de ces gĂ©ants de l’aviation est en jeu. Il est essentiel qu’ils trouvent des solutions pour amĂ©liorer leur chaĂźne de production et rĂ©pondre Ă la demande croissante. »